L’architecture hospitalière est un thème d’une importance considérable. Elle concerne des centaines de milliers de mètres carrés de construction chaque année en France et a un impact certain sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire. Elle est fréquentée par des millions d’entre nous chaque année, soit pour une visite à un patient, soit pour une consultation, un examen, une intervention ou pour un séjour plus long. Elle est le lieu de travail de centaines de milliers de personnels hautement qualifiés qui exercent 24 heures sur 24. En bref, elle est un enjeu sociétal de première importance sous de multiples aspects.
D’un point de vue plus professionnel, la conception d’un bâtiment hospitalier est caractérisée par une complexité extrême due à des exigences multiples et souvent contradictoires :
– Cohabitation dans la même structure d’espaces ayant des fonctions et des contraintes totalement différentes tels que les espaces d’accueil et de consultation, les unités d’hébergement, les espaces des plateaux médico-techniques avec l’imagerie, la médecine nucléaire, la radiothérapie, les secteurs interventionnels, les soins intensifs, tous caractérisés par de fortes contraintes techniques, les espaces de process quasi industriels tels que les laboratoires, les stérilisations, les pharmacies y compris toutes les composantes logistiques de stockage et de distribution le plus souvent automatique, les espaces tertiaires d’administration…
– Mise à disposition d’espaces confortables, rassurants et sécurisés pour des consultants ou des patients fragilisés par leur pathologie.
– Mise à disposition d’espaces fonctionnels, ergonomiques et agréables pour un personnel très sollicité.
– Contrôle de l’impact environnemental et des dépenses d’énergies.
– Adaptabilité du bâti, notamment du plateau médico-technique, pour permettre d’intégrer les multiples évolutions technologiques et sociétales dans le domaine de la santé.
– Intégration de volumes significatifs dans le contexte urbain et environnemental spécifique du projet y compris les multiples conséquences en termes de déplacements, de création d’activités connexes et d’image.
Il en résulte la nécessité d’une coordination étroite et suivie entre une équipe de conception multidisciplinaire composée d’architectes, d’ingénieurs et de consultants représentant de très nombreuses spécialités, une équipe de maîtrise d’ouvrage associant les représentants des utilisateurs et les institutions en charge des multiples autorisations à solliciter pour la réalisation et la mise en exploitation. La réussite d’une opération hospitalière dépend donc de très nombreux facteurs qu’aucune partie ne maîtrise dans sa totalité.
Un architecte qui possède de nombreuses réalisations hospitalières à son actif me rappelait récemment avec juste raison l’humilité qui sied à tous les participants confrontés à la problématique d’une opération de construction hospitalière. Des solutions qui peuvent apparaître comme séduisantes pour un spécialiste peuvent s’avérer des échecs parce qu’un aspect spécifique des données n’a pas été pris en compte.
Paradoxalement, et ce malgré la richesse du sujet, mais peut être justement du fait de la complexité et du caractère collectif de la conception qui y préside, les réalisations hospitalières sont peu traitées dans les revues professionnelles d’architecture. Or la diffusion de l’information, le partage d’expériences, l’analyse des réalisations récentes, les comparaisons avec les réalisations étrangères, le point de vue des concepteurs, des maîtres d’ouvrage et des utilisateurs, sont des éléments fondamentaux pour découvrir les innovations, les nouveaux concepts, les nouvelles tendances et les meilleures pratiques évitant ainsi de reproduire des expériences qui n’ont pas donné les résultats attendus.
La revue « Architecture Hospitalière » s’est donnée des objectifs ambitieux pour faire découvrir et traiter des multiples facettes de cette problématique. C’est un outil qui participe ainsi pleinement à la diffusion des connaissances et au partage des expériences, éléments incontournables pour une démarche d’amélioration permanente de la qualité, de l’efficience et de l’humanité de nos établissements.
C’est pourquoi je lui souhaite succès et longue vie.
Jacques Roos
Président IHF
Ingénieur général aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg